La redoutable tactique des tunnels et caches souterraines, une invention de Ben Laden, dont on a eu un remake chez nous à Jebel Chaâmbi, a été ingénieusement développée par le Hamas. Au grand dam d’Israël. Rappel de l’histoire.
Début 2012, La Presse publie un article qui fera date et sensation en Tunisie et ailleurs. Intitulé «De Tora Bora à Jebel Chaâmbi», il servait de simple mise en garde aux autorités du pays contre les menaces intégristes qui commençaient, lentement mais sûrement, à se préciser dans nos murs. La tactique « diabolique » des tunnels et caches souterraines était justement parmi ces menaces potentielles. Et pour en avoir le cœur net, La Presse a cité dans ledit article l’exemple de la spectaculaire chasse à l’homme à l’américaine dont fut l’objet Oussama Ben Laden à la fin des années 90, en Afghanistan.
En effet, souvenons-nous, poussé hors de ses bastions, activement recherché par les Américains, l’homme fort d’Al-Qaïda finit alors par se retrancher avec une poignée de ses fidèles lieutenants dans son dernier réduit de Tora Bora, du nom de la plus haute montagne de ce pays. Localisé quelques jours après sa cavale par les radars de l’oncle Sam, on lui imposa un siège impitoyables avec une surveillance à distance 24 heures sur 24, avant de passer — l’impatience aidant — à l’épreuve de force, à travers d’interminables bombardements lancés par des avions chargés au maximum de leur capacité de bombes à fragmentation.
Au point que la cache présumée des fugitifs a été quasiment rasée. Et alors que les Yankees s’apprêtaient à savourer la victoire, leur bonheur tourna court, puisqu’au lieu du cadavre de Ben Laden, ils tombaient sur de… longs tunnels creusés sous la montagne par ceux qu’on croyait avoir liquidés dans des décombres sous l’ampleur des frappes aériennes. Psychose et choc dans le monde entier ! Et c’est paradoxalement en prenant, pour une fois, congé de «ses» tunnels que le number one d’Al-Qaïda sera éliminé plus tard au premier étage de sa résidence au Pakistan.
En relatant ces péripéties, La Presse voulait, par devoir et patriotisme, épargner à la nation l’éventualité d’un remake dans l’une de nos régions montagneuses, et particulièrement sous le mont Chaâmbi, incontestablement le plus élevé en Tunisie. En guise de «récompense», le chef du gouvernement de l’époque jeta son dévolu sur notre journal pour le harceler avant de pousser l’hystérie jusqu’à déclarer à un quotidien parisien que «cet article n’a rien de crédible» et que «la Tunisie est entre de bonnes mains, parce que vaccinée contre le terrorisme».
Dans la foulée, faut-il le rappeler, de pseudo-experts et chroniqueurs tunisiens totalement dépassés par les événements et voulant s’acheter une fausse gloire par le mensonge et la recherche folle du sensationnel, ne se lassaient pas de faire le tour des studios et plateaux TV et radio, rien que pour tirer à boulets rouges sur notre pauvre article et, par là, conférer plus de crédit à la calamiteuse position du gouvernement !
Et on connaît la suite. Mais pour rafraîchir les mémoires, rappelons que quelques semaines après, le mont Chaâmbi, jusque-là dans les oubliettes, a été envahi par les terroristes qui s’y sont réfugiés… sans plus jamais en sortir. Et cela à la faveur, encore une fois, des tunnels et caches souterraines qu’ils avaient creusés. Le plus bizarre, c’est que les autorités ne s’en apercevront qu’en… 2014, via un communiqué du ministère de la Défense faisant état de «la découverte de cachettes souterraines avec de petites ouvertures pour l’aération, une grotte entre les rochers, ainsi que des restes de nourriture, couvertures et médicaments». Le même communiqué a ajouté que «ces cachettes ne sont visibles que de près» et que «les terroristes posent souvent des mines tout autour de leurs campements»… Sans commentaire!
Touche pas à mes tunnels
Par contre, le Hamas aura appris par cœur et la leçon de Ben Laden et la récitation de Tora Bora. C’est d’autant plus vrai que ce mouvement a même fait mieux, en réussissant le tour de force d’aménager, au nez et à la barbe du Mossad, un nombre record de tunnels enfouis dans tout le territoire de la bande de Gaza. Rien à voir, en tout cas, avec les pourtant célèbres bunkers de l’armée allemande des années 20-30-40. C’est donc grâce à cette trouvaille de Ben Laden, qu’on dit encore très prisée par les mouvements Hezbollah, Daech, Al-Qaïda, Boko Haram, Shabab et des Houthis, que les héros gazaouis ne cessent de mener la vie dure aux Israéliens. Avec bien évidemment la nette différence que le Hama, contrairement à ces milices citées, y a recours dans le seul but de récupérer ses terres spoliées par l’occupant sioniste.
